|  Propos recueillis en novembre 2005
DERNIÈRE SORTIE : "Mourning Sun" |
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|  |   |  |    | Par Christophe Lorentz | Photo D.R. |
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|  | Annoncé en 2002 comme l’album de la résurrection, "Fallen" s’était avéré n’être qu’une gigantesque tromperie. Après s’être emmuré dans un inquiétant silence durant près de trois ans, l’énigmatique Carl McCoy revient enfin aujourd’hui avec un disque à la hauteur du meilleur de Fields of the Nephilim. Premier album officiel du "groupe" en presque dix ans (soit depuis le très métallique "Zoon"), "Mourning Sun" ressuscite les atmosphères évocatrices, les constructions épiques et les incantations mystiques de "The Nephilim" ou "Elizium". Quant à son créateur, il reste toujours aussi drapé de mystère, rajoutant à l’aura si particulière de son envoûtant projet.
On sait désormais que "Fallen" n’était pas un véritable album de Fields of the Nephilim. Peux-tu nous expliquer ce qui s’est passé exactement avec ce disque ? Je ne peux pas l’expliquer avec exactitude, je ne peux que donner ma version des faits. Je n’aime d’ailleurs pas trop en parler… J’avais commencé à écrire et à composer de nouveaux morceaux à cette période, c’était un processus assez douloureux et à vrai dire le label ne nous était pas d’une grande aide. Alors qu'il était déjà trop tard, j'ai découvert que des démos que je venais d’enregistrer, et même des démos de titres datant de l’époque de "Zoon", avaient été éditées sous le nom de Fields of the Nephilim. Ces chansons avaient même des titres qui n’étaient pas ceux que je leur avais donnés ! Je ne sais toujours pas ce qui s’est réellement passé, mais j’ai été très irrité par tout ça, parce que je travaillais assez dur à ce moment-là pour faire un nouvel album. Cela nous a donc obligés à repenser et restructurer tout notre travail.
Mais si tu avais réussi à finaliser ces démos, est-ce qu’elles auraient sonné comme ce que l’on entend sur "Mourning Sun" ? Oui. Nous voulions aller bien plus loin au fur et à mesure du travail sur la production et les arrangements. Le but était effectivement de finir ces morceaux, mais ce n’est pas ce qui s’est passé. Il m’est arrivé plusieurs fois par le passé de ne pas être capable de sortir un album, pour une raison ou pour une autre, comme, par exemple, des problèmes contractuels. Mais à ce moment-là, j’étais vraiment impatient de pouvoir enfin sortir un nouveau disque, j'ai donc été très frustré. C’était une très mauvaise expérience, mais j’essaie de ne plus y penser et de regarder vers l’avenir plutôt que vers le passé.
Aujourd’hui, considères-tu que c’est une résurrection pour Fields of the Nephilim ? Je ne dirais pas que c’est une résurrection puisque je considère que depuis le début je ne me suis jamais arrêté. Je n’ai pas changé, j’essaie toujours de réaliser les mêmes choses, je poursuis le voyage de Nephilim et le concept qui l’accompagne à travers les albums. C’est comme si j’avais toujours été là, je ne suis jamais parti. C’est juste que je n’ai malheureusement pas sorti beaucoup d’albums (rire).
Y a-t-il un concept, ou un thème général qui court tout au long de "Mourning Sun" ? Probablement… Bien entendu, j’ai ma propre conception du sens et ma propre symbolique de ce qu’il y a derrière ce disque, car "Mourning Sun" a une grande signification pour moi. Je dirais qu’il représente principalement quelque chose de neuf, un nouveau départ. Plus que tout ce que j’ai pu faire auparavant, ce disque symbolise le fait de regarder vers l’avant, vers un jour nouveau. En quelque sorte découvrir le futur du passé, si tu vois ce que je veux dire…
Il semblerait que "Mourning Sun" devait être un double album ? Oui, il devait effectivement y avoir un double album. Nous avons encore quelques morceaux en réserve, mais nous ne voulions pas que ce disque soit ridiculement long. Je trouve qu’il est bien équilibré tel que je l’ai arrangé. J’ai d’autres titres qui sortiront sous un format ou un autre, l’année prochaine si tout va bien.
Tu sembles distinguer Fields of the Nephilim, The Nephilim et Nefilim... Quelles sont les différences entre ces projets ? (Rires) Il n’y a pas de réelles différences, à part les époques. Ils font tous partie du même voyage, ils reflètent tous mon concept global de The Nephilim. Tous transmettent des sensations et des émotions, même si celles-ci changent d’un disque à l’autre. Quand j’ai fait "Zoon", j’ai changé le nom simplement parce que je trouvais que cet album était alors très différent de ce que j’avais fait auparavant, et que je ne voulais pas dérouter les fans. Si il était sorti sous le nom de Fields of the Nephilim, ils auraient pu croire qu’il allait être comme "Elizium" ! Mais lorsque j’y repense aujourd’hui, je me dis que je n’aurais pas dû changer de nom car ce disque colle finalement bien avec le reste.
Qu’est-ce qui avait motivé une telle agressivité dans ta musique à cette époque-là ? Je pense que cette agressivité fait partie de mon personnage, c’est un des aspects de ma personnalité. Quand nous avons fait "Elizium", nous nous sommes concentrés sur un seul aspect, et tu ne peux pas avoir l’un sans l’autre. "Zoon" est en quelque sorte né d’"Elizium", c’était la réponse à cet album. Il est bon d’expérimenter tous les types d’émotions, car c’est de cela que nous sommes tous fait.
Certains sont déçus que tu n’aies pas poursuivi dans la voie de "Zoon". N’as-tu jamais eu envie de revenir à ce type de son très violent ? J’aime faire en sorte que chaque nouvel album soit différent du précédent, et nous avons toujours senti qu’il fallait fonctionner ainsi. Je ne sais pas encore ce que je ferai dans le futur, mais je ne reviens jamais sur ce que j’ai fait dans le passé. Il y a tant de projets musicaux encore plus intenses à venir que le public découvrira de nouvelles variations dans notre travail. Tout peut arriver, mais ce sera toujours sous le nom de Fields of the Nephilim quoiqu’il arrive.
Tu as visiblement été influencé par la philosophie d’Aleister Crowley (père du satanisme et créateur de la Golden Dawn), et il y a d’ailleurs une chanson titrée New Gold Dawn sur l’album. Considères-tu toujours Crowley comme une source d’inspiration ? Je ne le considère pas comme un de mes héros. Je l’admirais beaucoup quand j’étais plus jeune, tout comme j’admirais d’autres personnes. Contrairement à ce que les gens ont l’air de croire, je ne l’ai jamais étudié. Je trouve simplement que nous avons des points communs dans nos manières de travailler. C’était quelqu’un qui aimait expérimenter des choses et il était aussi très cynique. Mais c’était surtout quelqu’un de brillant. J’aime par-dessus tout la manière dont il jouait avec les mots. Je ne dirais pas que c’est une influence, mais plutôt quelqu’un à qui je peux m’identifier.
Quelle est l’importance du mysticisme dans ta vie quotidienne ? Je ne peux pas vraiment séparer quoi que ce soit de ma vie : ma musique et ma création sont ma vie, tout est lié. J’ai toujours utilisé le symbolisme dans ce que je fais, la plupart du temps pour des raisons personnelles.
Sur ton site officiel, il y a une étrange section à propos d’une sorte d’ordre mystique nommée The Order of the 24th Moment. Peux-tu nous expliquer ce que c’est ? Je ne peux pas en dire grand-chose, car ce n’est pas le bon moment pour en parler. Je pense que de nombreuses choses seront dévoilées bientôt. Mais j’ai été très occupé par mon projet musical ces derniers temps, donc je n’ai pas eu le temps de me pencher dessus. Ça a beaucoup de rapport avec moi, cela fait partie des mes activités liées au reste. C’est une expression plus profonde de ce que je fais déjà au niveau musical. C’est tout ce que je peux en dire…
Le look très “western spaghetti” de Fields of the Nephilim est plutôt à l’opposé de ta symbolique occulte. Y a t-il un lien particulier entre ces tenues et les références mystiques de tes textes ou de tes visuels ? Peut-être... Je ne trouve pas que ce soit réellement une imagerie de western. L’allure que nous nous sommes donnée est plus proche pour moi de l’homme ténébreux, qui est présent sous diverses formes dans de nombreuses cultures. Même dans le vaudou, cet homme ténébreux est représenté quelque part. Quand j’étais plus jeune, j’étais fasciné par ce type de personnage et nous en avons fait un mix avec la manière dont je m’habillais. Je me sentais surtout bien dans ce genre de vêtements. Mais nous n’avons jamais vraiment voulu nous habiller comme des cow-boys. Nous nous sommes peut-être un peu amusés avec ça à nos débuts, mais si tu regardes attentivement ce que nous portons c’est en fait plus victorien ou européen que western…
Fields of the Nephilim a toujours été assimilé à la scène gothique. Que penses-tu de cela ? Ça ne me dérange pas, ça m’a toujours paru positif. C’est le type de public que nous avons attiré toutes ces années et c’est bien ainsi. Un nom ou une catégorie ne signifient rien pour moi, je pense plutôt que c’est une attitude et que c’est quelque chose lié à la culture. Notre public est très fervent, il s’est étendu au fil des ans et il est surtout très nombreux en Europe centrale. Je n’ai aucun problème avec l’étiquette gothique.
Quand tu considères l’ensemble de ta carrière, de quoi es-tu le plus fier ? Je suis très fier de chaque moment du passé. Parce qu’évidemment, s’il n’y avait pas eu le premier album, personne n’aurait été là pour faire "Mourning Sun" ! C’était le point de départ de notre voyage, et notre but était d’en expérimenter toutes les possibilités et d’élargir notre vision. Et c’est ce que nous avons fait. Je n’ai donc aucun regret concernant ce que nous avons entrepris par le passé, parce que tout cela fait partie du voyage. Mais en même temps je ne regarde pas en arrière, il y a des reflets de ce qu’était précédemment le groupe dans ce que je fais aujourd’hui, parce que j’ai grandi à travers lui. Mais j’aime à penser que j’ai réussi à offrir là une version plus mature de ce que nous étions avant.
Quelles sont tes attentes pour le futur de Fields of the Nephilim ? J’aimerais être sûr de pouvoir sortir plus d’albums et de façon plus régulière (rires). Ça m’a pris beaucoup de temps avant d’être capable de prendre certaines décisions et de changer ma manière de travailler. J’espère que cela va me permettre d’être plus productif dans le futur. J’ai beaucoup d’idées et de choses que je veux terminer. Mais je fais les choses les unes après les autres. Cet album a été un gros projet pour moi et il sort seulement maintenant. Donc pour le moment, je me concentre dessus. |  |  |  | | |  | |
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