|  Propos recueillis en novembre 2005
DERNIÈRE SORTIE : "Bang Bang Rock & Roll" |
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|  |   |  |      | Par Christophe Lorentz | Photos D.R. |
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|  | Crue, urgente, jubilatoire et faussement distanciée, la musique d’Art Brut évoque un croisement entre l’énergie froide des Stranglers, la morgue bruyante de The Fall et la lucidité pop de Pulp. Avec un premier album très excitant sorti l’an dernier ("Bang Bang Rock’n’Roll"), et des concerts français ayant permis de vérifier la bonne tenue de sa pop abrasive sur scène, le groupe mené par le facétieux Eddie Argos (chant) compte désormais parmi les formations à suivre de très près. Hâtivement assimilé au "revival post-punk" anglais, Art Brut se révèle en fait beaucoup moins ouvertement connoté qu’Editors ou Interpol, mais tout aussi savoureux et dynamique que The Rakes ou Maxïmo Park. Oserait-on à nouveau parler de révélation ?
Lorsqu’Art Brut est né, souhaitais-tu atteindre un but particulier avec ta musique ? Non. Art Brut était alors un groupe à géométrie variable, composé de gens qui s’étaient rencontrés à la suite de coïncidences diverses. J’étais juste heureux que l’on me permette de faire partie de ce groupe.
Pourquoi avoir choisi un nom qui est aussi celui d’un mouvement artistique français ? L’art brut est mon mouvement artistique favori. Je l’ai découvert en lisant un article autour d’une polémique selon laquelle Van Gogh, qui est mon artiste préféré, relèverait en réalité de l’art brut. J’ai alors senti que ce que mon groupe faisait était aussi de l’art brut, puisque chacun d’entre nous amenait sa musique vers des directions différentes, que nous n’appartenions à aucune scène précise, que je ne savais pas chanter, que Freddy apprenait à jouer de la basse uniquement pour faire partie du groupe, etc.
Comment expliques-tu le titre de votre premier album, “Bang Bang Rock’n’Roll” ? Cette expression est tirée de Cappuccino Bar, une chanson de Jonathan Richman dans laquelle il chante à propos de l’excitation que procure la musique. Je trouvais aussi que notre musique était excitante, et j’aimais en plus cette image de tuer le rock’n’roll avec un flingue !
Tes textes semblent être assez ironiques et pleins d’humour… Je n’essaie pas d’être ironique ou sarcastique : je dis simplement la vérité. Mais il y a effectivement de l’humour dans mes paroles, car je pense que la vie est amusante et que les gens ne devraient pas avoir peur de laisser transparaître cela dans les chansons. Je m’inspire de ma vie et de tout ce qui m’entoure, et si cela donne quelque chose de drôle, c’est justement parce que je m’efforce de dire les choses telles qu’elles sont.
Ta musique et ton chant évoquent The Fall ou The Stranglers. Ces groupes sont-ils des références pour toi ? Non. Bien qu’il soit clair que les leaders de ces groupes ne savaient pas chanter, eux non plus. Je ne suis de toute façon pas fan des groupes des années 80, même si j’aime bien The Cure…
Tu as déclaré être un grand fan de Pulp. En quoi ce groupe a-t-il influencé ton travail ? Je ne pense pas qu’il m’ait réellement influencé, en fait. Mais je reste effectivement un fan absolu de Pulp : ils étaient très largement au-dessus de tous les autres groupes qui existaient à ce moment-là. Et j’imagine que le fait d’avoir grandi en écoutant un groupe qui chante de façon sincère sur son entourage et sur sa vie quotidienne a dû avoir un effet sur moi.
Que penses-tu de cette sorte de “new-wave of new-wave” qui a éclôt en Angleterre et aux USA avec Bloc Party, Interpol, The Bravery, The Rakes ou Editors ? Je trouve tout cela plutôt ennuyeux. Tous ces groupes sonnent un peu pareil. Il y a juste The Rakes que j’aime bien : je trouve qu’ils ont de très bons textes. Mais je ne me sens absolument pas proche de l’esprit ou de la musique des autres artistes que tu as cités.
“Bang Bang Rock’n’Roll” est composé de chansons courtes, énergiques et très directes. Était-ce un choix délibéré ? Non, c’est juste que tout s’est mis en place comme cela au final. Nous sommes des gens très directs et nous avons une capacité d’attention très réduite. Pour ma part, je suis aussi quelqu’un de très énergique, qui peut-être très en colère ou très heureux. C’est donc probablement pour cela que nos compositions sont ainsi.
Votre disque a aussi un son quasi punk, et vous deviez d'ailleurs participer à un concert en hommage aux Sex Pistols. Que signifie pour toi le terme "punk" aujourd’hui ? Je dirais que, pour moi, le mot punk signifie “faire ce que tu veux”. Nous n’avons d’ailleurs pas participé à ce concert commémorant les Sex Pistols, car il s’est avéré que le projet s’était transformé en quelque chose qui se rapprochait plus d’un horrible cirque de drogués mené par Christine Dior et le groupe The Paddingtons. Selon nous, cela ressemblait davantage à une glorification de la saloperie qui avait tué Sid Vicious, et nous ne voulions plus rien avoir avec cela.
Comment vois-tu aujourd’hui le futur d’Art Brut ? J’attends de voir comment ça va se passer. Mais en fait, je compte faire seulement deux albums. |  |  |  | | |  | |
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