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|  | Noir Magnétique | |
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|  | Cela fait maintenant trois décennies que sévit Die Form dans des contrées musicales froides, électro-mécaniques, dansantes, à tendance fétichiste. L'arrivée de ce "Noir Magnétique" ne faillit pas à la règle et confirme l'immense talent du combo avec ses lignes de synthés obsédantes et cette dualité parfaite au chant qui représentent bien la teneur particulière et inimitable du duo depuis ses débuts. Un chant féminin qui insuffle aux compositions lyrisme, sensualité et volupté exacerbées, contrebalancé par des refrains masculins voccodés robotiques, presque malsains et expérimentaux : le feu souffle sur la glace. Artillerie lourde et salve de hits dansants aux beats ravageurs sont au programme avec Decadence, Nocturnal Emotions ou encore Hertz Frequenz, mais aussi des titres plus mid-tempo teintés d'heavenly voices comme Tristesse et Vox Angelica qui aèrent et enrichissent la diversité musicale de ce nouvel opus. De part ses atmosphères riches et variées, le paysage sonore aimante puissamment l'auditeur et ce, du début à la fin, sans aucun temps mort. Philippe Fichot et Eliane P. n'ont de cesse avec ce "Noir Magnétique" d'expérimenter de nouvelles sonorités ultra-modernes couplées à un univers analogique plus old school accédant ainsi à un rétro-futurisme musical ciselé, original, et très réussi. Ce Die Form d'une nouvelle ère convaincra autant les aficionados des premières heures du combo que les adeptes exigeants en musique industrielle et électronique racée. À s'approprier les yeux fermés. |  | Jean-Marc Chabrerie |  |
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|  | Disco Negro | |
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|  | Aerôflôt colle à l'air du temps de par son brassage original entre sonorités issues de l'époque post-punk, cold-wave, et élans synthétiques caractérisant l'ère actuelle. En cette décennie, dont la fin aura été dédiée à un revival se voulant moderne, mais faisant au final appel à un certain passéisme, ce disque trouvera une place de choix, tant les chansons qui le constituent se montrent singulières et convaincantes. Un allant bienvenu les porte déja vers les sommets, tandis que les guitares acides, doublées de plans de synthés à la fois volubiles et atmosphériques, appuyés par une rythmique qui tourne elle aussi sans ratés, achève d'en faire des morceaux de choix. On pense aux Hollandais de zZz, dont la tentative de remettre la folie de Suicide au goût du jour s'est vu couronnée de succès sur "Running with the beast" ; mais "Disco Negro", le disque de ces trublions d'Aerôflôt (également auteurs d'un split EP avec les bordelais d'Adam Kesher en 2006) charme sans rémission en même temps qu'il vous emporte dans une sarabande rythmique soulignée par ses envolées d'orgue dignes des Doors dans leur période la plus endiablée. Il est ainsi vain de chercher à détacher tel ou tel titre de ce bel ensemble ; tous méritent d'être distingués et par conséquent, c'est ce disque dans son intégralité qu'il convient de saluer. |  | William Dumont |  |
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|  | When the Rains Come | |
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|  | Les dandys britanniques d'And Also The Trees qui se font brillamment remarquer avec leur songwriting hanté, subtil et délicat, depuis le début des années 80, nous offrent aujourd'hui avec leur nouvel opus, "When The Rains Come", une relecture acoustique, habitée, de compositions datant aussi bien de leur début, "Virus Meadow", que de leur tout dernier disque particulièrement réussi "(Listen for) the Rag & Bone Man", couvrant ainsi une carrière qui s'étale sur plus de 25 ans. Il est vrai qu'un tel travail est souvent perçu comme un exercice périlleux, mais ici, la présence du cello, de l'accordéon, de la contrebasse et de la guitare acoustique transfigure totalement les morceaux en leur apportant une aura d'un romantisme noir étincelant rarement atteint. La voix suintante de mélancolie de Simon Jones reste intemporelle et distille, couplée avec ces chansons dépouillées, de toute beauté, une émotion indicible, sans fin. L'âme de leurs compositions en ressort donc magnifiée, multipliée et grandie à l'infini. Cet album est donc à conseiller aux fins limiers, fans des premières heures du groupe, mais aussi aux autres, plus jeunes, amateurs par exemple de dark folk qui n'ont pas eu encore le plaisir, la chance, de tomber dans les filets de ce groupe majeur. En un mot : grandiose. |  | Jean-Marc Chabrerie |  |
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|  | Downtown Cuckoo | |
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|  | Pour l'amateur de rock un tant soit peu décalé, il est bien évident que Rennes, qui entre autres surprises de taille nous a permis de profiter de Sloy, Skippies ou encore Dominic Sonic, constitue l'une des places fortes de l'hexagone. Les Downtown Cuckoo nous en apportent une preuve de plus avec cet album éponyme devant autant à The Fall qu'à Marquis de Sade, illustre formation... rennaise, ayant illuminé la fin des années 70 aux cotés de groupes comme Kalashnikov. Il est cependant impératif de noter que Downtown Cuckoo, en dépit d'influences avérées, possède son propre univers, sa propre démarche, et par là même, ne sonne pas, loin s'en faut, comme un vulgaire plagiaire. Légèrement moins sombre que les groupes précités, il en modernise et en personnalise les climats, cette méthode ayant pour vertu d'engendrer dix morceaux d'obédience post-punk aboutis, dont aucun n'a à souffrir la moindre critique négative. On pense aussi, à l'écoute, aux groupes de chez Born Bad, qui en marchant sur les traces de certaines figures de proue, insufflent au "relifting" effectué suffisamment d'ingéniosité et de savoir-faire pour parvenir à un résultat au dessus de tout soupçon. L'urgence et la mélodie sont ici parfaitement associées et à, l'instar de Crocodiles de Strasbourg, Downtown Cuckoo signe des débuts tonitruants, qui laissent augurer d'une suite pour le moins convaincante. |  | William Dumont |  |
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|  | Steeltongued | |
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|  | Extraterrestre ! Telle est la musique de Hecq, le projet musical du designer sonore Ben Lukas Boysen, qui enchaîne parallèlement les travaux sonores pour la publicité et les courts métrages, ainsi que les commandes de remixes. Chacun ici se souvient d'ailleurs des relectures intégrales des deux derniers albums d'In Strict Confidence, sous-titrées "The Hecq Destruxxions", et qui sont, disons-le tout net, de véritables modèles du genre. Ceux qui se sont demandé après avoir vu "2001 : l'Odyssée de l'Espace" quels sons pouvait engendrer l'univers en perpétuelle expansion ont eu la réponse l'an dernier avec le précédent disque de Hecq, l'exceptionnel et pénétrant "Night Falls". Le Berlinois revient aujourd'hui avec "Steeltongued", authentique ovni de la galaxie IDM composé entre 2007 et 2009. Reconnu maître es-ambient plombée et traitée au noir intégral (Distant Fires, Lost for Words et Hypnos), l'Allemand crée surtout des boucles et schémas rythmiques qui ne sont pas d'origine terrestre, car ils ne répondent à aucune loi, aucun schéma connu ; et pourtant quelle puissance, quel espace, quelle profondeur, quel panache ! Évitant soigneusement de tomber dans le bruitiste gratuit et irritant qui pollue souvent le genre, Ben Boysen s'applique à donner une leçon de fabrication de sons à ses congénères. Douze remixeurs se réapproprient d'ailleurs le titre éponyme de ce sixième album, Steeltongued, pour douze versions que l'on retrouve sur le second CD de ce double disque intense. Audace et créativité démultipliées, l'univers de Hecq se prête finalement bien au jeu ; un jeu dont le gagnant pourrait bien être Xabec pour sa réinterprétation impeccable et pour le coup, tout a fait terrestre. |  | Bertrand Hamonou |  |
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|  | Pen Fifteen | |
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|  | "Pen Fifteen" est un disque énorme, et le matériau que façonne Keith Baker est tellement dense et rare qu'Hymen Records lui a permis de le sortir sous la forme d'un double CD, seulement le troisième du label allemand en un peu plus de soixante-dix références. C'est dire si le disque en impose ! Cinquième album pour cet artiste anglais, bassiste de formation, d'abord porté sur le death metal puis le jazz, et enfin compositeur de cette IDM post industrielle si personnelle, teintée de riffs de guitare et de basse qu'il est le seul capable d'insuffler dans une musique d'ordinaire cent pour cent électronique. Et le résultat est là, massif, inespéré, vierge, comme un nouveau terrain de jeu que l'on découvrirait enfin après des années lasses et vaines. "Pen Fifteen", le premier disque, fait la part belle aux guitares et aux basses lourdes, soutenues par des beats ciselés et des claviers envoûtants. Mais pas seulement, puisqu'un piano a trouvé sa place dans cet enchevêtrement de pulsations parfois saturées, souvent jouées sur une vraie batterie, augmentant ainsi le crédit "musique de film imaginaire" du disque. Quant à la deuxième face de ce monstre crossover inédit, "Light City", elle s'étire le long d'une pièce unique, plus électronique que la première, et découpée en douze parties de cinq minutes chacune, sans concession. "Light City" recèle tout autant de moments d'anthologies, comme cette ligne de basse plus vraie que nature sur Acid Indigestion, et l'on comprend alors à quel point "Pen Fifteen" est un disque intelligent, audacieux, d'une modernité rarement égalée, et forcément indispensable. |  | Bertrand Hamonou |  |
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