Ikaruga
Nintendo GameCube
[Treasure / Atari]
Il y a jeu vidéo et jeu vidéo. Dans ce marché saturé de jeux très grand public formatés, paresseux, médiocres et bourrés de cinématiques, il est intéressant de voir que certains éditeurs résistent à la tentation de la facilité en nous permettant à nous, pauvres gamers européens habitués à être les derniers servis après le Japon et les Etats Unis, de découvrir quelques unes de ces petites merveilles d'esthétisme et de gameplay qui se font régulièrement au pays du Soleil-Levant. C'est le cas ici d'Ikaruga, magnifique shoot'them up oldschool réalisé par Treasure, éditeur japonais qui avait porté le coup de grâce à la Dreamcast en sortant ce même jeu dans les derniers mois de vie de la console de Sega. Le voici adapté sur le Gamecube de Nintendo, dans une version globalement identique dans sa réalisation (toujours aussi incroyable) et dans son principe toujours aussi génial : les gens de Treasure ont en effet réussi à dépoussiérer le genre en axant tout leur jeu sur une règle simple mais infernale : celle de la dualité noir/blanc. On peut en effet inverser la couleur du vaisseau que l'on dirige (et donc celle de ses tirs) à tout moment : noir ou blanc. Noir, il sera invincible aux tirs de cette couleur (et donc vulnérable aux blancs) mais détruira plus difficilement les ennemis de cette même couleur (donc plus facilement les blancs). Et inversement bien sûr. On se retrouve donc à changer de couleur en permanence selon les situations, et il n'est pas rare d'avoir l'impression de devenir complètement fou devant l'incroyable difficulté du jeu et la complexité des situations. Ce paradoxe manichéen de cette dualité noir/blanc et de la stratégie attaque/défense, la qualité de réalisation technique, l'esthétisme high-tech nippon du jeu (et de ces artworks) et la difficulté désespérante du challenge font d'Ikaruga, un véritable petit bijou d'élitisme et de provocation. Un titre magnifique qui revient à l'essence même du jeu vidéo : le gameplay.
Renaud Martin